« Réinstaller une dynamique en Europe »

Issue de l’histoire de Sanofi, Euroapi est aujourd’hui une entreprise indépendante avec un large panel de technologies et des capacités de production européennes en principes actifs pharmaceutiques. En continuant d’investir, l’objectif est d’améliorer encore la croissance, en s’appuyant sur une dynamique en Europe.

Comment est née Euroapi ?

Sylvia Cabrillac-Rives : Remontons le cours de l’histoire. Sanofi a annoncé le 24 février 2020 ce projet de créer une entité dédiée à la production et à la commercialisation pour des tiers de principes actifs pharmaceutiques (en anglais API, Active Pharmaceutical Ingredients). La volonté était qu’Euroapi soit une société indépendante. Le pari est réussi, puisque nous sommes cotés sur Euronext Paris depuis le 6 mai dernier.

De quelles forces disposez-vous pour soutenir votre émancipation ?

S. C.-R. : Euroapi est le leader mondial des « petites molécules » chimiques (par opposition aux « grosses molécules » biologiques) avec plus de 200 API conférant aux médicaments leurs effets thérapeutiques. Nous proposons également des services innovants et personnalisés aux laboratoires pharmaceutiques et aux sociétés de biotechnologies pour leurs molécules complexes à forte valeur ajoutée. Un autre point fort est d’être une entreprise mondiale avec une empreinte industrielle unique en Europe. Nos six sites de production sont européens, proposant un large panel de technologies.

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Quel est l’éventail de vos technologies ?

S. C.-R. : Notre site de Haverhill, en Angleterre, est spécialisé dans la chimie en continu et le séchage par atomisation. En France, nous disposons d’une très forte capacité de fermentation à Saint-Aubin-lès-Elbeuf, en Normandie, qui est aussi le seul site producteur occidental de vitamine B12. À Vertolaye, dans le Puy-de Dôme, nous fabriquons toute la chaîne des corticostéroïdes sur un site expert dans la chimie des poudres. En Allemagne, nous investissons 18 millions d’euros à Francfort pour porter les capacités de production de peptides et d’oligonucléotides à près de 500 kilos par an d’ici à 2025. Deux autres sites complètent notre portefeuille : celui de Budapest, en Hongrie, est spécialisé dans les prostaglandines, et celui de Brindisi, en Italie, fabrique des anti-infectieux comme les antituberculeux. Nous avons aujourd’hui de belles ambitions pour chacun de nos sites avec de nombreux clients qui nous sollicitent sur des médicaments de plus en plus complexes et variés.

Comment les attirer sur un marché fragmenté et très compétitif ?

S. C.-R. : Le marché mondial des API est en croissance de 6 à 7 % par an. L’enjeu est de capitaliser sur notre indépendance pour devenir acteur de la montée en puissance des nouvelles molécules, en proposant des services sur mesure et à valeur ajoutée. Plus de 330 personnes travaillent en R&D au sein d’Euroapi. Nous allons doubler cet effectif et également investir environ 500 millions d’euros d’ici à 2025 pour accroître la production et être plus compétitifs. Nos sites assurent une fabrication de qualité et une chaîne d’approvisionnement fiable et performante. Nous disposons ainsi de nombreux atouts pour jouer un rôle dans la relocalisation de molécules essentielles en Europe.

Sylvie
SYLVIA CABRILLAC-RIVES, RESPONSABLE DES AFFAIRES PUBLIQUES CHEZ EUROAPI

Comment être acteur de cette relocalisation sanitaire ?

S. C.-R. : La crise sanitaire a révélé l’ampleur des vulnérabilités de la chaîne d’approvisionnement des médicaments. Nous sommes un maillon essentiel aujourd’hui pour la sécuriser grâce à notre portefeuille de molécules critiques, que ce soit au niveau des intermédiaires ou des API, avec notre empreinte européenne. Nous disposons donc des capacités et des technologies nécessaires pour prendre part à la relocalisation. La volonté d’innover est aussi présente pour s’inscrire dans une production durable, à faible impact environnemental. En témoigne notre récent investissement dans une chaufferie biomasse à bois B, à Saint-Aubin-lès-Elbeuf.

Quelles sont les clés du succès à l’avenir ?

S. C.-R. : Pour relocaliser, nous devons bénéficier d’un cadre favorable en Europe garantissant une concurrence équitable dans un marché mondialisé. Il existe entre 5 000 et 6 000 API ; ce n’est pas aux acteurs industriels de décider quelles substances sont à relocaliser, mais à l’Europe et aux gouvernements de proposer une liste de molécules essentielles. Il faut aussi un environnement propice à l’innovation pour assurer la transformation industrielle indispensable à une production européenne durable. Dans cette perspective, le plan Innovation Santé 2030 en France est une initiative à saluer. Cette politique de soutien de l’offre, demandée par toute la profession, devra s’accompagner d’un soutien de la demande pour que nos clients choisissent une production européenne sur d’autres critères que le seul prix. Ce sont des mesures clés pour assurer la souveraineté sanitaire européenne.

Propos recueillis par Marion Baschet Vernet

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Un acteur français en croissance

Le chiffre d’affaires d’Euroapi devrait atteindre environ un milliard d’euros cette année, contre 902 millions en 2021. Le groupe emploie 1 200 salariés dans l’Hexagone sur 3 350 dans le monde, répartis dans six usines en Europe, avec une présence commerciale aux États-Unis et au Japon notamment. En 2022, Euroapi a rejoint l’initiative du Pacte mondial des Nations unies et signé la charte Responsible Care®.

Responsable des affaires publiques chez Euroapi depuis décembre 2020.

Un parcours de plus de vingt ans chez Sanofi, avec des responsabilités croissantes en développement clinique, médico-marketing, affaires publiques, gestion d’équipes commerciales et direction d’une unité opérationnelle transverse au sein de la filiale France, comprenant notamment la direction hospitalière et l’outre-mer.

Article extrait du magazine Passerelles 82, pour consulter le dernier numéro cliquez ici.